A propos de l'extension du 40m

J’avais initialement envoyé ce qui suit sous forme d’email sur la liste des Présidents Départementaux du REFU, mais  cette liste dispose visiblement d’une communication directe avec Onlineradio, et mon message s’y est retrouvé instantanément. Je vais donc le publier ici également, avec l’avantage de pouvoir y répondre aux éventuels commentaires, chose que je ne fais pas sur Online. Ce message long et pénible est le résultat de mes recherches au sujet de l’extension du 40m…

J’ai essayé d’être aussi précis que possible, et donc de citer toutes les sources afin de permettre à ceux ou celles qui le souhaiteraient d’aller voir à la source.

Comment doit se faire l’extension du 40m ?

Ce qu’il faut bien comprendre, c’est d’abord que nous avons en France un système administratif à la noix (spécialité bien française que l’on peut également retrouver dans les statuts actuels du REFU) qui attribue les fréquences NON PAS à leurs utilisateurs, MAIS à leurs administrations de tutelle. Lesquelles les attribuent à leur tour à leurs « administrés ».

Le tout sous le contrôle de l’ANFR, agence dont le rôle est de « planifier l’usage du spectre » entre les différentes administrations de tutelle.

Donc si vous aviez R.F.I qui émettait (via T.D.F) sur 7130kHz ce n’est pas parce que cette fréquence (ou cette bande) était attribuée à T.D.F. La bande 7100-7200 était attribuée au C.S.A, qui administre en France les opérateurs de  l’audiovisuel. Le CSA attribue ensuite le 7130kHz selon des procédures qui lui sont propres, de la même façon qu’il attribuerait le 105,5MHz pour France-Info.

L’extension du 40m consiste donc en plusieurs étapes:

  • Dé-attribution du segment 7100-7200 du CSA
  • Attribution du segment à l’ARCEP
  • Attribution par l’ARCEP aux radioamateurs

Lu comme cela c’est assez simple, mais chaque étape est constituée de plusieurs « sous-étapes », ce qui complique et ralentit singulièrement le processus. Il en est de même de l’intervention de l’ANFR.

A l’inverse, la majorité des autres pays du monde font simple: L’état attribue directement le segment aux radioamateurs, qu’il « gère » directement.

Les étapes, en détail

– A l’été 2003 (!) lors de la Conférence Mondiale des Radiocommunications (CMR-03), il est décidé de modifier le Règlement des Radiocommunications (RR) de l’UIT en fixant au 29 Mars 2009 la date à laquelle le segment 7100-7200 devrait être abandonné par la radiodiffusion au profit des radioamateurs. Le RR de l’UIT est un document contraignant pour la France: L’UIT est un organisme de l’ONU chargé de réglementer et d’harmoniser l’usage des fréquences au plan mondial, et la France se doit donc d’appliquer les pactes internationaux qu’elle a conclu. Le RR constitue le cadre réglementaire mondial d’utilisation du spectre applicable aux 191 Etats Membres de l’UIT.

Malheureusement, l’UIT fait commerce du RR, et il faut débourser 308CHF pour se le procurer. C’est un comportement scandaleux dont elle n’a pas le monopole, j’y reviendrai. Heureusement, le RC 4U1ITU a mis en ligne gratuitement quelques extraits nous concernant.

– Personne ne se préoccupe de la situation entre 2003 et 2009. Il est évident qu’il faudra agir, mais l’administration, avec son grand sens de l’anticipation, ne fait rien. Elle renvoie même l’URC dans ses cordes corsque celle-ci émet l’idée d’une affectation anticipée.

– A l’étranger, certains pays dotés d’administrations intelligentes obtiennent l’attribution du segment aux  radioamateurs à titre secondaire avant la date fatidique, dès 2004 (nous avons donc CINQ ANS DE RETARD sur eux ! BRAVO LA FRANCE !). Il s’agit par exemple du Royaume-Uni, de l’Irlande, la Croatie, la Norvège ou San-Marin.

– Chez nous, tout le monde se cramponne à ses petits privilèges. Ce n’est pas pour rien que l’on appelle les fréquences (et aussi les numéros de téléphone) des « ressources rares » ! Ainsi du CSA ou de RFI, qui continuera à émettre sur 7130kHz pendant plusieurs années (je n’ai pas la date d’arrêt effectif ?)

– L’affaire somnole donc jusqu’en Mars 2009, et le 11 Mars 2009, la Commission de Planification des Fréquences  (ANFR) inscrit (enfin) le sujet à l’ordre du jour. Le principe du transfert du segment du CSA vers l’ARCEP est décidé

– La décision est validée lors du Conseil d’Administration de l’ANFR du 26 Mars 2009.

– Le CSA et l’ARCEP dépendent de Ministères différents. Le transfert doit donc s’effectuer par l’intervention d’une autorité supérieure, c’est à dire le Premier Ministre.

– Le 10 Avril 2009, un courrier du Premier Ministre interroge donc les deux autorités en cause (ARCEP et CSA) sur le projet de modification du TNRBF. Le projet comporte le point qui nous concerne (7100-7200) ainsi que d’autres modifications. Le TNRBF (Tableau National de Répartition des Bandes de Fréquence) est un document de référence qui précise pour chaque bande de fréquences radioélectriques le ou les services de radiocommunication autorisés en France et le ou les affectataires français correspondants. Il est maintenu par l’ANFR. Il n’est pas disponible gratuitement en ligne, l’ANFR en fait commerce en le vendant 60€.

– Le 30 Avril 2009, l’ARCEP rend l’avis qui lui a été demandé par le Premier Ministre. En ce qui nous concerne, la rédaction de cet avis est particulièrement trompeuse, puisque l’ARCEP écrit « En application des dispositions du numéro RR. 5.141 du règlement des radiocommunications, l’attribution la bande 7 100-7 200 kHz au service de radiodiffusion en régions 1 et 3 est supprimée. Cette bande est attribuée au service amateur à titre primaire au profit de l’Autorité en région 1. »

Plus tard, certains esprits s’emballeront à la lecture de cette phrase, à tort: Quand elle écrit « cette bande est attribuée », l’ARCEP ne veut pas dire « nous l’attribuons » (elle n’a pas la possibilité de le faire à ce stade, si vous avez bien suivi !), l’ARCEP ne fait que constater que cette bande est attribuée aux radioamateurs, sur le plan international, par le RR ! En conséquence, l’ARCEP rend un avis favorable.

– Le 19 Mai 2009, le CSA rend un avis favorable et sibyllin

– Le 25 Juin 2009, le Premier Ministre décide . Mais à vrai dire, on ne sait rien de ce qu’il décide. Il arrête juste une modification du TNRBF. Mais comme je l’ai écrit ci-dessus, le TNRBF, il faut payer pour voir.

– A ce stade, le REF commet une BIG boulette alors que l’URC informe les radioamateurs de façon précise.

Nous en sommes aujourd’hui à ce stade. Le segment est donc transféré à l’ARCEP, qui doit désormais nous l’attribuer.

Si l’on consulte le site de l’ARCEP on peut constater que c’est en bonne voie, mais la décision de l’ARCEP « désignant des bandes de fréquences pour les installations de radioamateurs » n’est pas encore prise.

C’est une décision soumise à homologation du Minitère de tutelle de l’ARCEP (Economie, Industrie, Emploi). Il faudra donc qu’elle soit homologuée par un arrêté de ce Ministre. Le tout sera alors publié au Journal Officiel, et nous pourrons alors légalement utiliser ce segment.

Pour un exemple de ces deux étapes lors d’une modfication de nos bandes, voir une précédente décision similaire de l’ARCEP et son homologation. A vrai dire, je me demande si la décision fait l’objet d’une quelconque publication avant son homologation. Nous avons donc peut-être franchi l’étape « ARCEP » sans le savoir.

Addendum à propos du TNRBF

Je vous invite à retourner lire la décision du Premier Ministre du 25 Juin 2009.

Le Premier Ministre nous dit en substance « j’ai décidé quelque chose, mais je ne vous dis pas quoi, c’est dans le TNRBF ». Et l’ANFR nous dit « Vous voulez voir le TNRBF ? Mais oui bien sur, c’est 60€ ».

Et après on nous dit que « nul n’est censé ignorer la loi » ? Je trouve cela proprement scandaleux.

Suite à la publication de l’arrêté du Premier Ministre, j’ai donc candidement demandé à l’ANFR à recevoir gratuitement le TNRBF. Bien entendu, j’ai eu la réponse à laquelle je m’attendais: Envoyez 60€.

Devant une situation aussi nulle, j’ai donc réitéré ma demande de TNRBF gratuit en LRAR. Je n’ai pas reçu de réponse.

J’ai donc saisi la Commission d’Accès aux Documents Administratifs du refus qui m’était opposé par l’ANFR.

J’ai reçu hier la décision de la CADA. La voici. La Commission conclut dans un sens qui m’est favorable, elle considère que l’ANFR doit fournir (et pas qu’à moi, d’ailleurs) le TNRBF gratuitement.

Voila donc un point de marqué.

A la lecture de cela, je devine déjà certaines remarques « si on passe notre temps à ennuyer l’administration, pas étonnant après qu’elle soit peu réceptive à nos demandes ». Je pense que ce stade-là est dépassé.

La mauvaise volonté administrative est évidente pour tout ce qui concerne l’évolution de notre environnement règlementaire (parmi les 191 états-membres de l’ITU, je serai curieux de faire le compte de ceux qui ont déjà attribué le segment 7100-7200 à leurs radioamateurs en application de la CMR-03, et ceux qui ne l’ont toujours pas fait !). Notre règlementation est extrêmement rétrograde, qu’il s’agisse des fréquences, des classes d’émissions, des possibilités d’interconnexion etc..

Si l’administration française était seule, il y a bien longtemps qu’elle aurait tiré un trait sur le radioamateurisme. Il ne survit chez nous que grâce aux conventions internationales, et les rares avancées que nous obtenons viennent toutes de l’étranger.

3 réponses sur « A propos de l'extension du 40m »

Ce qu’il nous faut……. un ministre ou haut fonctionnaire qui est radioamateur…………… tout simplement………. sinon………………………….

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